34-Prin-balbutie-temps
Amis des nuits noires, bonsouaaaaaaaar!
Février m'avait bien gâté côté ciel, puis cela s'est gâté à partir de l'éclipse.
D'ailleurs, pourrais-je parler de mes observations du printemps? Quel printemps?
L'équinoxe a commencé avec l'hiver, puis une période automne, quelques jours d'été et maintenant que je me remémore la saison, il fait gris, assez doux et très humide.
L'espoir d'un soir d'hiver
Fin mars. Le Forsythia fleurit timidement, la tortue n'est pas encore sortie de son hibernation.
Sans chauffage, je l'imite: le meilleur endroit pour passer ses soirées, c'est sous une bonne couverture.
Mais vous me connaissez n'est-ce pas? Toujours un œil en alerte pour voir si le ciel ne retire pas la sienne.
Ce soir peut-être?
Je m'installe avec un bouquin en attendant un voyage dans la nuit...
Ah, enfin la voilà Ma'am Lune!
Elle monte de derrière le toit plat, énorme, lumineuse, presque aveuglante.
Jamais elle ne m'a paru si somptueuse, à l'œil nu, elle semblait aussi grosse qu'avec mes bigs binos!
Nettement plus que l'habituelle illusion d'optique quand elle se libère de l'horizon.
Elle monte lentement. Ce n'est pas Pierrot lapin ou le clown qui se dessine sur le disque, mais le visage d'une femme...une muse.
Uranie! Uranie qui vient conter les merveilles célestes?
Je frotte mes paupières et regarde par la fenêtre. Il y a plein de points blancs dans le ciel...non, ce ne sont pas des étoiles: il neige.
Bah, j'ai fait un beau rêve, c'est déjà ça!
Je me rendors en caressant le chat qui ronronne sous la couverture.
(c'est fou à quoi on peut songer en rêvant...)
Lunatique comme l'automne
"Qui manifeste une humeur changeante et imprévisible", telle est une définition de lunatique, tel était le temps d'avril.
Dans ces cas il est hors de question de partir en vadrouille, voire même d'installer le matos sur le toit.
C'était trop risqué: une éclaircie pouvait céder place à une averse ou de la grêle en moins de temps qu'il ne faut au fisc pour rappeler un retard de payement.
Cependant les jeux de lumière et les contrastes qu'offre cette météo sont souvent superbes.
(faut voir le bon côté des choses)
Le télescope restait donc en stand-by à l'intérieur, à l'affût près de la porte de la terrasse.
Au menu: Saturne en la Lune.
Je trouve que Saturne fait bien durer le suspense pour la disparition des anneaux: ça décline, puis ré-augmente, déclinera à nouveau...
Faudra attendre 2009 les amis!
Petite histoire: il y a 12 années saturniennes, Huygens observait la planète avec les Naglers de l'époque (des Huygens) mais ne voyait pas les "protubér-anses" que son illustre prédécesseur avait notées.
Loin de lui l'idée d'hasarder une feinte sur l'acuité visuelle de l'Italien (quoiqu'il n'était plus là pour lui casser la gueule), Huygens émit l'hypothèse que les anses vues par Galilée seraient un ou des anneaux entourant Saturne. Etant plats, leur inclinaison par rapport à la Terre changeait avec le temps.
Si on ne les voit plus, c'est qu'ils sont de profil.
Bien vu le bonhomme, fallait y penser quand-même! C'était en 1655.
(c'est fou à quoi on peut songer en regardant Saturne...)
Et la Lune, "imprévisible"?
Disons qu'il a fallu des générations d'astronomes pour y comprendre quelque chose.
Encore maintenant beaucoup de gens pensent que les phases sont dues à l'ombre de la Terre.
Il suffit cependant d'un schéma montrant l'orbite de la Lune autour de la Terre, le tout éclairé de côté par le Soleil, pour comprendre le mécanisme.
Prenons du recul maintenant et imaginons le schéma vu de profil, avec l'axe de rotation de la Terre incliné de 23,5° par rapport à son orbite autour du Soleil.
Cela explique déjà les saisons, avec les solstices et équinoxes (comme avec Saturne en fait, son inclinaison est plus grande encore: 27°)
Mettons pour simplifier l'orbite de la Lune sur le même plan: on voit qu'en hiver, quand le Soleil est bas la journée, la pleine Lune sera haute la nuit et inversément en été.
Aux équinoxes de l'automne et du printemps par contre, ce sont les premiers et derniers quartiers qui jouent au yoyo!
En effet, au printemps le premier quartier occupe (relativement) la même place que le Soleil d'été.
Ajoutons à cela le fait que l'orbite de la Lune est inclinée de 5° par rapport à l'écliptique et on peut avoir une variation de 57° en hauteur.
Pour compliquer le tout, d'année en année l'écart semble se déplacer. Ceci est du au fait que la Lune orbite comme un cerceau juste avant de tomber à plat sur le sol.
Vous l'avez remarqué j'espère, ce premier quartier très haut dans le ciel et le dernier au raz des pâquerettes?
Ah, si l'architecte suprême n'avait pas bâclé son boulot en nous proposant des trucs tordus au lieu de belles orbites joliment circulaires et dans le même plan, des axes bien perpendiculaires, nous aurions eu une éclipse lunaire par cycle, une flopée d'occultations planétaires et les équatoriens des éclipses de Soleil à gogo (même que tout cela serait devenu banal)!
Mais tant mieux je trouve.
J'ose affirmer que sans cette complexité, la civilisation se serait contentée d'explications simples avec mythes et légendes. Jamais elle n'aurait découvert l'immensité et la beauté de l'Univers!
(c'est fou à quoi on peut songer en regardant la Lune...)
L'été en mai
Après l'hiver et l'automne, voici l'été en ce début mai, le monde à l'envers...
M'en fous: beau temps garanti pour une dizaine de jours.
Là, alors moi, là, alors là moi, là, je ne vais pas rater UNE occasion d'en profiter.
A part une virée en voiture avec Fritzmayo, toutes les "mini-vacances" étaient vers Chapois, à mon avis le meilleur ciel accessible en train et à pied.
Ce ciel et le 300 m'offrent plus que le 200 au Lubeuhron!
(qu'est-ce que je vais prendre mon pied avec le 300 là-bas en Haute-Provence)
Plein de merveilles révisitées donc, redécouvertes avec émerveillement.
M51 par exemple, la double spiralée, plus haute dans le ciel par rapport à mes premières observations au 300, les bras se voyaient déjà en vision directe.
En vision décalée, c'était tout simplement fabuleux!
Mais je vais plutôt m'attarder sur des nouveautés en ce qui me concerne.
- Iota Cnc.
L'étoile la plus boréale du Y inversé représentant l'écrevisse vaut amplement la visite: c'est la sœur jumelle d'Albiréo, hormis l'éclat plus faible (elle n'est pas facile à repérer sous un ciel semi-urbain)
Mêmes couleurs orange et bleue, la double est séparée d'une trentaine de secondes d'arc et se dédouble donc facilement à faible grossissement.
Une merveille en attendant la plus belle double de l'été.
- NGC2903.
Facile à trouver en prolongeant la faucille du Lion vers l'Ouest (1,4° au Sud de l'orangée Lambda), cette galaxie spirale (barrée) est déjà visible au chercheur 9X50.
Le bulbe central se distingue bien par sa brillance dans cette charmante tache ovale.
Dire que notre Voie Lactée, vue depuis là-bas, devrait donner une image semblable.
Il me plaît d'imaginer un NGC29-zéro-troyïen en train de pondre un croa comme je suis occupé maintenant!
- M105 et ses copines.
Du nettement plus concentré que le trio M65/66/NGC3628, le trio M105/NGC3384/3389 m'avait échappé jusqu'à présent (je m'attardais sur les autres voisines, M95/96)
Quelle erreur! On peut grossir et elles restent toutes les trois dans le champ. Les 0,4° que j'ai à 150X suffisent amplement.
Avec le 200, je jugeais la qualité du ciel en regardant NGC3628.
Désormais ce sera le trio M105: voir 3384 (convenablement) me remplit de joie et si la plus faible (3389)ressort bien, je ne me couche pas de la nuit.
-M97.
Nébuleuse planétaire en dessous de la Grande Poële, dite "du hibou".
Elle mérite son nom, mais j'avoue que je "savais" ce que je devais voir.
Pas facile les yeux du volatile, mais faisable.
Dommage que j'avais rendu le filtre interférentiel à Fritzmayo.
-M108.
Elle me fait penser au cigare M82, j'y retournerai pour un "comparatif".
Plus faible de toute façon, mais intéressante grâce aux zones plus sombres dont elle est parsemée.
-NGC4565.
Aussi connue sous Caldwell38, c'est une pure merveille!
Près de l'immense rassemblement d'étoiles Melotte111 (Chevelure de Bérénice) se trouve cette galaxie vue parfaitement de côté.
Une fine et longue, très longue aiguille argentée.
Dire que je l'ai pointée par curiosité celle-là, sans savoir à quoi m'attendre.
Une autre taf de bonheur à ma pipe s'imposait.
-NGC6207.
Faut du diamètre là et grossir, et encore, cela reste une minuscule tache grise ovalisée.
Une galaxie dont les photons nous parviennent de bien loin derrière le globulaire géant: M13, le grand lama d'Hercules.
Rien de spectaculaire?
Que nenni!
En soi peut-être bien je l'accorde, mais la perspective cosmique est hallucinante.
Commençons par une occultation de planète par la Lune, on voit une minuscule Saturne ou autre disparaître derrière notre proche voisine.
Passons à l'échelle supérieure: une planète qui se promène devant un amas.
J'ai toujours Saturne en tête, errant dans l'amas ouvert de la Crèche.
Vous voyez où je veux en venir?
Les amas ouverts font partie de notre galaxie, ils sont "proches".
Maintenant on regarde un amas globulaire, relique des constituants de notre galaxie, les globulaires sont situés dans un halo qui entoure la Voie Lactée, on est déjà plus loin.
Puis tout petit là dans le fond, une autre galaxie, une autre Voie lactée, d'autres mondes...
Notre galaxie n'est qu'un petit schmillblick dans l'Univers et quelque part dans un des bras, pas plus grand qu'un point, se trouve notre système solaire, où la Terre fière n'y représente qu'une minuscule boulette.
Une partie seulement est habitable et les gens, infimes points sur cette boule qui n'est que point dans un point dans un tas de points, se tassent dans des villes...
Dire que parmi ces gens, il y en a qui ne pensent qu'à leur notoriété.
(c'est fou à quoi on peut songer en regardant NGC6207...)
Que du bonheur donc de voyager avec le 300!
Pas facile avec le matos annexe, mais cela c'est arrangé pour la saison prochaine: le fermier de la colline d'en face n'étant pas dérangé par ma (discrète) présence, il veut bien me laisser un petit coin dans une grange où je pourrai stocker mon matos de survie entre deux escapades: tente, sac-de-couchage, veste et vêtements chauds...c'est tout un fardeau de moins à trimballer.
En outre j'ai la possibilité de me ravitailler en eau, encore un bon 3kg de gagnés.
C'était justement LE problème de la première virée.
Deux formidables nuits et aucune envie de rentrer sur Bruxelles car le ciel semblait de plus en plus pur.
Mais comment tenir encore 24H avec à peine un demi litre de flotte?
Je me préparais déjà mentalement et avec beaucoup de regrets à plier bagages quand j'entends au loin les cris et hurlements d'une tribu sauvage (pas oublier que je suis en Wallonie là)
Effrayé mais prenant mon courage et couteau à deux mains, je rampe dans les hautes herbes pour tenter de voir quel rituel se déroulait en bas de la colline.
Un sacrifice peut-être? D'autant plus qu'il y a une odeur de chair brûlée.
Prudemment, je risque un regard par dessus le talus.
Ouaaaaaiiiiis! Une compet locale de minifoot, avec buvette et barbecue.
Sauvé! J'étais au paroxysme de l'apogée de la quintessence du nirvana là!
Rassasié de baguette/saucisse/moutarde, désaltéré avec une bonne blonde, la réserve d'eau fraîche, j'ai pu prolonger cette vadrouille sous le plus beau ciel que je n'ai jamais vu en Belgique.
En attendant l'été, le vrai...
Après cette fenêtre ouverte, le spectacle céleste s'est retiré bien vite, sans bis ou rappel.
Il fait gris, le temps est maussade et humide...de toute façon, le solstice d'été approche et aux latitudes style 51° Nord c'est la disette question ciel profond: le Soleil reste trop près de l'horizon Nord, pas de nuits noires pour en passer des blanches.
Coup de gueule si je puis me permettre: le solstice d'été, le tropique du Cancer...sous le Soleil exactement.
"Tropique du Cancer" est un terme datant de 1532, "Capricorne" un peu plus tard: 1562.
Magellan avait déjà notifié nos plus proches voisines galactiques, Henri le Navigateur, Vasco, Christophe Colomb...ont sillonné le monde du Nord au Sud, d'Ouest en Est et vide ce verre sale.
Des navigateurs obligatoirement astronomes.
Au 16ème, on se cassait la tête pour réformer le calendrier Julien (justement à cause de la précession des équinoxes qui ferait à la longue tomber Pâques à Noël...)
Comment ce fait-ce que le cercle du solstice d'été boréal soit nommé Tropique du Cancer?
Suffit de regarder le ciel au coucher ou avant le lever pour savoir où il est Mister Soleil: aux pieds des Gémeaux là maintenant, c'est comme ça et il y a quelques siècles aussi.
Déjà au II° avant JC, Hipparque (Samothos pour les intimes) avait remarqué quelque chose de bizarre en lisant des vieux numéros de Ouranos&Cosmos (magazine astro néo-préhistorique) qu'il avait hérité de ses ancêtres: au solstice d'été, le Soleil prenait sa pause café à l'ombre du Lion.
"Δι;ντρεμ ιντεν ντ ιλ πρενδ σον π2ρο ψηε λε ψ;νψερ?!" s'écria-t-il.
("Diantre! Maintenant il prend son apéro chez le Cancer ?!")
En toute logique, regardant les dates des vieux magazines, il en déduit que l'axe de rotation de la Terre n'est pas stable. Sans vraiment savoir comment et caisse, la précession des équinoxes sur 26000 ans n'avait (en principe) plus de secrets pour l'humanité.
Au temps de Cheops (le Sphinx et les énormes tentes en pierre) , le Soleil était dans le Lion au solstice d'été.
Un bon gros millénaire voire deux plus tard, quand Hipparque levait ses yeux aux cieux, c'était dans le Cancer. Depuis plus de 5 siècles, le Soleil fricote avec les Gémeaux.
Et dans n'importe quel manuel scolaire, atlas, mappemonde, c'est incroyable je trouve, on lit "Tropique du Cancer", pire encore, en Flamoutch: "Keerkreeftskring" (imprononçable pour la plupart des gens).
La puissance du lobbying astrologogogo règne depuis plus de deux millénaires.
Puis ils se défendent en nous insultant qu'on ne connaît pas la différence entre "signe" et "constellation".
Puis il y a les autres là, style new age, qui sont peut-être un peu moins cons question astronomie mais tout aussi nuisibles avec leur nouvelle et bénéfique "ère du Verseau".
Il est temps que ça cesse! J'ecgigue, j'exsjige...je voudrais qu'on fasse une pétition internetationale pour changer cette aberration en "Cercle de Gainsbourg" et "Cercle de Gainsbarre"
Ou alors en plus sobre (héhé) "Cercle d'été Boréal et Austral"
Non mais!
Merci pour la lecture,
Patte.
Février m'avait bien gâté côté ciel, puis cela s'est gâté à partir de l'éclipse.
D'ailleurs, pourrais-je parler de mes observations du printemps? Quel printemps?
L'équinoxe a commencé avec l'hiver, puis une période automne, quelques jours d'été et maintenant que je me remémore la saison, il fait gris, assez doux et très humide.
L'espoir d'un soir d'hiver
Fin mars. Le Forsythia fleurit timidement, la tortue n'est pas encore sortie de son hibernation.
Sans chauffage, je l'imite: le meilleur endroit pour passer ses soirées, c'est sous une bonne couverture.
Mais vous me connaissez n'est-ce pas? Toujours un œil en alerte pour voir si le ciel ne retire pas la sienne.
Ce soir peut-être?
Je m'installe avec un bouquin en attendant un voyage dans la nuit...
Ah, enfin la voilà Ma'am Lune!
Elle monte de derrière le toit plat, énorme, lumineuse, presque aveuglante.
Jamais elle ne m'a paru si somptueuse, à l'œil nu, elle semblait aussi grosse qu'avec mes bigs binos!
Nettement plus que l'habituelle illusion d'optique quand elle se libère de l'horizon.
Elle monte lentement. Ce n'est pas Pierrot lapin ou le clown qui se dessine sur le disque, mais le visage d'une femme...une muse.
Uranie! Uranie qui vient conter les merveilles célestes?
Je frotte mes paupières et regarde par la fenêtre. Il y a plein de points blancs dans le ciel...non, ce ne sont pas des étoiles: il neige.
Bah, j'ai fait un beau rêve, c'est déjà ça!
Je me rendors en caressant le chat qui ronronne sous la couverture.
(c'est fou à quoi on peut songer en rêvant...)
Lunatique comme l'automne
"Qui manifeste une humeur changeante et imprévisible", telle est une définition de lunatique, tel était le temps d'avril.
Dans ces cas il est hors de question de partir en vadrouille, voire même d'installer le matos sur le toit.
C'était trop risqué: une éclaircie pouvait céder place à une averse ou de la grêle en moins de temps qu'il ne faut au fisc pour rappeler un retard de payement.
Cependant les jeux de lumière et les contrastes qu'offre cette météo sont souvent superbes.
(faut voir le bon côté des choses)
Le télescope restait donc en stand-by à l'intérieur, à l'affût près de la porte de la terrasse.
Au menu: Saturne en la Lune.
Je trouve que Saturne fait bien durer le suspense pour la disparition des anneaux: ça décline, puis ré-augmente, déclinera à nouveau...
Faudra attendre 2009 les amis!
Petite histoire: il y a 12 années saturniennes, Huygens observait la planète avec les Naglers de l'époque (des Huygens) mais ne voyait pas les "protubér-anses" que son illustre prédécesseur avait notées.
Loin de lui l'idée d'hasarder une feinte sur l'acuité visuelle de l'Italien (quoiqu'il n'était plus là pour lui casser la gueule), Huygens émit l'hypothèse que les anses vues par Galilée seraient un ou des anneaux entourant Saturne. Etant plats, leur inclinaison par rapport à la Terre changeait avec le temps.
Si on ne les voit plus, c'est qu'ils sont de profil.
Bien vu le bonhomme, fallait y penser quand-même! C'était en 1655.
(c'est fou à quoi on peut songer en regardant Saturne...)
Et la Lune, "imprévisible"?
Disons qu'il a fallu des générations d'astronomes pour y comprendre quelque chose.
Encore maintenant beaucoup de gens pensent que les phases sont dues à l'ombre de la Terre.
Il suffit cependant d'un schéma montrant l'orbite de la Lune autour de la Terre, le tout éclairé de côté par le Soleil, pour comprendre le mécanisme.
Prenons du recul maintenant et imaginons le schéma vu de profil, avec l'axe de rotation de la Terre incliné de 23,5° par rapport à son orbite autour du Soleil.
Cela explique déjà les saisons, avec les solstices et équinoxes (comme avec Saturne en fait, son inclinaison est plus grande encore: 27°)
Mettons pour simplifier l'orbite de la Lune sur le même plan: on voit qu'en hiver, quand le Soleil est bas la journée, la pleine Lune sera haute la nuit et inversément en été.
Aux équinoxes de l'automne et du printemps par contre, ce sont les premiers et derniers quartiers qui jouent au yoyo!
En effet, au printemps le premier quartier occupe (relativement) la même place que le Soleil d'été.
Ajoutons à cela le fait que l'orbite de la Lune est inclinée de 5° par rapport à l'écliptique et on peut avoir une variation de 57° en hauteur.
Pour compliquer le tout, d'année en année l'écart semble se déplacer. Ceci est du au fait que la Lune orbite comme un cerceau juste avant de tomber à plat sur le sol.
Vous l'avez remarqué j'espère, ce premier quartier très haut dans le ciel et le dernier au raz des pâquerettes?
Ah, si l'architecte suprême n'avait pas bâclé son boulot en nous proposant des trucs tordus au lieu de belles orbites joliment circulaires et dans le même plan, des axes bien perpendiculaires, nous aurions eu une éclipse lunaire par cycle, une flopée d'occultations planétaires et les équatoriens des éclipses de Soleil à gogo (même que tout cela serait devenu banal)!
Mais tant mieux je trouve.
J'ose affirmer que sans cette complexité, la civilisation se serait contentée d'explications simples avec mythes et légendes. Jamais elle n'aurait découvert l'immensité et la beauté de l'Univers!
(c'est fou à quoi on peut songer en regardant la Lune...)
L'été en mai
Après l'hiver et l'automne, voici l'été en ce début mai, le monde à l'envers...
M'en fous: beau temps garanti pour une dizaine de jours.
Là, alors moi, là, alors là moi, là, je ne vais pas rater UNE occasion d'en profiter.
A part une virée en voiture avec Fritzmayo, toutes les "mini-vacances" étaient vers Chapois, à mon avis le meilleur ciel accessible en train et à pied.
Ce ciel et le 300 m'offrent plus que le 200 au Lubeuhron!
(qu'est-ce que je vais prendre mon pied avec le 300 là-bas en Haute-Provence)
Plein de merveilles révisitées donc, redécouvertes avec émerveillement.
M51 par exemple, la double spiralée, plus haute dans le ciel par rapport à mes premières observations au 300, les bras se voyaient déjà en vision directe.
En vision décalée, c'était tout simplement fabuleux!
Mais je vais plutôt m'attarder sur des nouveautés en ce qui me concerne.
- Iota Cnc.
L'étoile la plus boréale du Y inversé représentant l'écrevisse vaut amplement la visite: c'est la sœur jumelle d'Albiréo, hormis l'éclat plus faible (elle n'est pas facile à repérer sous un ciel semi-urbain)
Mêmes couleurs orange et bleue, la double est séparée d'une trentaine de secondes d'arc et se dédouble donc facilement à faible grossissement.
Une merveille en attendant la plus belle double de l'été.
- NGC2903.
Facile à trouver en prolongeant la faucille du Lion vers l'Ouest (1,4° au Sud de l'orangée Lambda), cette galaxie spirale (barrée) est déjà visible au chercheur 9X50.
Le bulbe central se distingue bien par sa brillance dans cette charmante tache ovale.
Dire que notre Voie Lactée, vue depuis là-bas, devrait donner une image semblable.
Il me plaît d'imaginer un NGC29-zéro-troyïen en train de pondre un croa comme je suis occupé maintenant!
- M105 et ses copines.
Du nettement plus concentré que le trio M65/66/NGC3628, le trio M105/NGC3384/3389 m'avait échappé jusqu'à présent (je m'attardais sur les autres voisines, M95/96)
Quelle erreur! On peut grossir et elles restent toutes les trois dans le champ. Les 0,4° que j'ai à 150X suffisent amplement.
Avec le 200, je jugeais la qualité du ciel en regardant NGC3628.
Désormais ce sera le trio M105: voir 3384 (convenablement) me remplit de joie et si la plus faible (3389)ressort bien, je ne me couche pas de la nuit.
-M97.
Nébuleuse planétaire en dessous de la Grande Poële, dite "du hibou".
Elle mérite son nom, mais j'avoue que je "savais" ce que je devais voir.
Pas facile les yeux du volatile, mais faisable.
Dommage que j'avais rendu le filtre interférentiel à Fritzmayo.
-M108.
Elle me fait penser au cigare M82, j'y retournerai pour un "comparatif".
Plus faible de toute façon, mais intéressante grâce aux zones plus sombres dont elle est parsemée.
-NGC4565.
Aussi connue sous Caldwell38, c'est une pure merveille!
Près de l'immense rassemblement d'étoiles Melotte111 (Chevelure de Bérénice) se trouve cette galaxie vue parfaitement de côté.
Une fine et longue, très longue aiguille argentée.
Dire que je l'ai pointée par curiosité celle-là, sans savoir à quoi m'attendre.
Une autre taf de bonheur à ma pipe s'imposait.
-NGC6207.
Faut du diamètre là et grossir, et encore, cela reste une minuscule tache grise ovalisée.
Une galaxie dont les photons nous parviennent de bien loin derrière le globulaire géant: M13, le grand lama d'Hercules.
Rien de spectaculaire?
Que nenni!
En soi peut-être bien je l'accorde, mais la perspective cosmique est hallucinante.
Commençons par une occultation de planète par la Lune, on voit une minuscule Saturne ou autre disparaître derrière notre proche voisine.
Passons à l'échelle supérieure: une planète qui se promène devant un amas.
J'ai toujours Saturne en tête, errant dans l'amas ouvert de la Crèche.
Vous voyez où je veux en venir?
Les amas ouverts font partie de notre galaxie, ils sont "proches".
Maintenant on regarde un amas globulaire, relique des constituants de notre galaxie, les globulaires sont situés dans un halo qui entoure la Voie Lactée, on est déjà plus loin.
Puis tout petit là dans le fond, une autre galaxie, une autre Voie lactée, d'autres mondes...
Notre galaxie n'est qu'un petit schmillblick dans l'Univers et quelque part dans un des bras, pas plus grand qu'un point, se trouve notre système solaire, où la Terre fière n'y représente qu'une minuscule boulette.
Une partie seulement est habitable et les gens, infimes points sur cette boule qui n'est que point dans un point dans un tas de points, se tassent dans des villes...
Dire que parmi ces gens, il y en a qui ne pensent qu'à leur notoriété.
(c'est fou à quoi on peut songer en regardant NGC6207...)
Que du bonheur donc de voyager avec le 300!
Pas facile avec le matos annexe, mais cela c'est arrangé pour la saison prochaine: le fermier de la colline d'en face n'étant pas dérangé par ma (discrète) présence, il veut bien me laisser un petit coin dans une grange où je pourrai stocker mon matos de survie entre deux escapades: tente, sac-de-couchage, veste et vêtements chauds...c'est tout un fardeau de moins à trimballer.
En outre j'ai la possibilité de me ravitailler en eau, encore un bon 3kg de gagnés.
C'était justement LE problème de la première virée.
Deux formidables nuits et aucune envie de rentrer sur Bruxelles car le ciel semblait de plus en plus pur.
Mais comment tenir encore 24H avec à peine un demi litre de flotte?
Je me préparais déjà mentalement et avec beaucoup de regrets à plier bagages quand j'entends au loin les cris et hurlements d'une tribu sauvage (pas oublier que je suis en Wallonie là)
Effrayé mais prenant mon courage et couteau à deux mains, je rampe dans les hautes herbes pour tenter de voir quel rituel se déroulait en bas de la colline.
Un sacrifice peut-être? D'autant plus qu'il y a une odeur de chair brûlée.
Prudemment, je risque un regard par dessus le talus.
Ouaaaaaiiiiis! Une compet locale de minifoot, avec buvette et barbecue.
Sauvé! J'étais au paroxysme de l'apogée de la quintessence du nirvana là!
Rassasié de baguette/saucisse/moutarde, désaltéré avec une bonne blonde, la réserve d'eau fraîche, j'ai pu prolonger cette vadrouille sous le plus beau ciel que je n'ai jamais vu en Belgique.
En attendant l'été, le vrai...
Après cette fenêtre ouverte, le spectacle céleste s'est retiré bien vite, sans bis ou rappel.
Il fait gris, le temps est maussade et humide...de toute façon, le solstice d'été approche et aux latitudes style 51° Nord c'est la disette question ciel profond: le Soleil reste trop près de l'horizon Nord, pas de nuits noires pour en passer des blanches.
Coup de gueule si je puis me permettre: le solstice d'été, le tropique du Cancer...sous le Soleil exactement.
"Tropique du Cancer" est un terme datant de 1532, "Capricorne" un peu plus tard: 1562.
Magellan avait déjà notifié nos plus proches voisines galactiques, Henri le Navigateur, Vasco, Christophe Colomb...ont sillonné le monde du Nord au Sud, d'Ouest en Est et vide ce verre sale.
Des navigateurs obligatoirement astronomes.
Au 16ème, on se cassait la tête pour réformer le calendrier Julien (justement à cause de la précession des équinoxes qui ferait à la longue tomber Pâques à Noël...)
Comment ce fait-ce que le cercle du solstice d'été boréal soit nommé Tropique du Cancer?
Suffit de regarder le ciel au coucher ou avant le lever pour savoir où il est Mister Soleil: aux pieds des Gémeaux là maintenant, c'est comme ça et il y a quelques siècles aussi.
Déjà au II° avant JC, Hipparque (Samothos pour les intimes) avait remarqué quelque chose de bizarre en lisant des vieux numéros de Ouranos&Cosmos (magazine astro néo-préhistorique) qu'il avait hérité de ses ancêtres: au solstice d'été, le Soleil prenait sa pause café à l'ombre du Lion.
"Δι;ντρεμ ιντεν ντ ιλ πρενδ σον π2ρο ψηε λε ψ;νψερ?!" s'écria-t-il.
("Diantre! Maintenant il prend son apéro chez le Cancer ?!")
En toute logique, regardant les dates des vieux magazines, il en déduit que l'axe de rotation de la Terre n'est pas stable. Sans vraiment savoir comment et caisse, la précession des équinoxes sur 26000 ans n'avait (en principe) plus de secrets pour l'humanité.
Au temps de Cheops (le Sphinx et les énormes tentes en pierre) , le Soleil était dans le Lion au solstice d'été.
Un bon gros millénaire voire deux plus tard, quand Hipparque levait ses yeux aux cieux, c'était dans le Cancer. Depuis plus de 5 siècles, le Soleil fricote avec les Gémeaux.
Et dans n'importe quel manuel scolaire, atlas, mappemonde, c'est incroyable je trouve, on lit "Tropique du Cancer", pire encore, en Flamoutch: "Keerkreeftskring" (imprononçable pour la plupart des gens).
La puissance du lobbying astrologogogo règne depuis plus de deux millénaires.
Puis ils se défendent en nous insultant qu'on ne connaît pas la différence entre "signe" et "constellation".
Puis il y a les autres là, style new age, qui sont peut-être un peu moins cons question astronomie mais tout aussi nuisibles avec leur nouvelle et bénéfique "ère du Verseau".
Il est temps que ça cesse! J'ecgigue, j'exsjige...je voudrais qu'on fasse une pétition internetationale pour changer cette aberration en "Cercle de Gainsbourg" et "Cercle de Gainsbarre"
Ou alors en plus sobre (héhé) "Cercle d'été Boréal et Austral"
Non mais!
Merci pour la lecture,
Patte.